Thursday, January 10, 2008

De Alfonso Jimenez (extrait de T-B 17)

FAIT D’HIVER

J’ai vu dans un bus une scène désopilante et pour tout dire violente, presque sarcastique. Un type, je l’avais remarqué, tournait autour d’une fille spécialement gironde. Il se troublait quand elle arrivait, j’entendais son palpitant palpiter plus fort que le tambour à la bataille d’Ellesmère, excusez du peu. Un beau jour, il eut l’audace de se déclarer, je le voyais venir de loin dans ses sabots de Savoie. Il lui dit : j’aimerais bien faire votre connaissance. Pourquoi ? fit simplement la fille. Parce que…bafouilla-t-il, impuissant. Je vous prie de me fiche la paix, laissa-t-elle tomber, souveraine. L’autre, cible de tous les regards, fit tourner ses prunelles trois fois à gauche et ses pupilles à droite, puis voulut se sauver comme l’oiseau s’envole à l’approche du chat : il se pendit à l’alarme, complètement ravagé. Quand le bus eut stoppé, il se jeta sans prudence ni discernement dans le flot de voitures qu’il traversa en droite ligne, indemne par miracle, et disparut à jamais. La fille, tranquille, n’a pas bronché.

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Incipits finissants (67)

On avait bien dit : plus jamais ça. Plus jamais ça, mais quoi ? C’est ce fantôme de l’autoritarisme, qui est de moins en moins un fantôme ...